Lorsqu’un salarié se trouve en arrêt maladie, la question de la rémunération se pose immédiatement, avec l’angoisse légitime de voir son revenu diminuer. Pourtant, le droit du travail encadre strictement les modalités de calcul des indemnités versées par la Sécurité Sociale, ainsi que les compléments éventuels apportés par l’employeur. Ces règles varient en fonction de l’ancienneté, de la nature du contrat, mais également du statut particulier du salarié concerné. Que vous soyez confronté à cette situation ou que vous souhaitiez simplement anticiper les impacts financiers d’un arrêt maladie, il est essentiel de comprendre les mécanismes précis de réduction de salaire et les exceptions prévues par la législation. Nous explorerons ici les méthodes de calcul, les droits des salariés selon leur statut, ainsi que les recours possibles face à une perte de salaire injustifiée.
Comment calculer la perte de salaire pendant un arrêt maladie : éléments clés et calculs pratiques
Le mécanisme de réduction de salaire en cas d’arrêt maladie repose avant tout sur la distinction entre les indemnités journalières versées par la Sécurité Sociale et le complément éventuellement pris en charge par l’employeur.
Conformément aux dispositions du Code du travail (articles L1226-1 et D1226-1), le salarié arrêté pour maladie bénéficie d’une indemnisation qui s’appuie sur le salaire brut moyen des trois derniers mois précédant l’arrêt. Cette moyenne sert de base pour le calcul du salaire journalier de base (SJB), obtenu en divisant la somme des salaires bruts par 91,25 jours, soit la moyenne des jours considérés.
La Sécurité Sociale verse alors une indemnité égale à 50 % de cette base de calcul, dans la limite d’un plafond journalier fixé à 41,47 € bruts en 2025. Ce plafond correspond à un salaire mensuel brut maximal de 2 522,52 €, soit 1,4 fois le SMIC mensuel fixé à 1 801,80 € en 2025. Après imposition des prélèvements sociaux tels que la CSG et la CRDS, réduisant l’indemnisation de 21 %, le montant net que percevra le salarié est moindre que ce plafond brut.
En parallèle, l’employeur peut être tenu d’assurer un complément de salaire, sous conditions :
- Le salarié doit justifier d’au moins un an d’ancienneté dans l’entreprise.
- Il doit percevoir les indemnités journalières versées par la Sécurité Sociale.
- L’arrêt doit être constaté dans un État membre de l’Espace Économique Européen (EEE) ou en France.
- Le salarié ne doit pas être intermittent, saisonnier, temporaire ou travailleur à domicile.
Le complément employeur consiste en un maintien partiel de la rémunération brute journalière :
- 90 % pendant une première période
- 66,66 % pendant une seconde période.
La durée de chacune de ces périodes varie selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise, comme le synthétise le tableau ci-dessous.
Ancienneté dans l’entreprise | Maintien à 90 % du salaire brut (en jours) | Maintien à 66,66 % du salaire brut (en jours) |
---|---|---|
1 à 5 ans | 30 | 30 |
6 à 10 ans | 40 | 40 |
11 à 15 ans | 50 | 50 |
16 à 20 ans | 60 | 60 |
21 à 25 ans | 70 | 70 |
26 à 30 ans | 80 | 80 |
31 ans et plus | 90 | 90 |
Exemple pratique : Une salariée, Sophie, employée depuis 4 ans et gagnant 2 400 € brut mensuels, est arrêtée 30 jours. La Sécurité Sociale lui verse une indemnité d’environ 32,76 € net par jour, après déduction des prélèvements sociaux. Son employeur complète cette indemnité afin d’atteindre à 90 % du salaire brut, soit environ 23 € net par jour supplémentaire. Sophie perçoit donc environ 56 € net par jour, contre 62 € habituellement. Sur la période totale, sa perte s’élève donc à environ 180 € net, sans compter une réduction plus marquée si l’arrêt se prolonge avec le taux inférieur.
L’impact financier de l’arrêt maladie est ainsi fortement modulé par la durée de l’ancienneté et le plafond de la Sécurité Sociale. Cette complexité justifie souvent la consultation d’experts, tels qu’un avocat spécialisé en droit du travail, afin de garantir la correcte application des règles et obtenir un complément à la hauteur des droits acquis.

Les règles spécifiques du maintien de salaire selon le statut du salarié : fonctionnaires, femmes enceintes et autres cas particuliers
Le cadre légal prévoit des exceptions particulières concernant la réduction de salaire lors d’un arrêt maladie, selon le statut du salarié. Fonctionnaires, salariées en congé maternité et autres catégories bénéficient en effet de règles spécifiques qui dérogent au droit commun applicable dans le secteur privé.
Les droits des fonctionnaires en arrêt maladie
Pour un fonctionnaire, le régime de maintien du salaire diffère sensiblement de celui du secteur privé.
- Congé maladie ordinaire : Le fonctionnaire bénéficie du maintien intégral de son traitement indiciaire et de ses primes pendant les trois premiers mois de son absence.
- Congé de longue maladie (CLM) : À l’issue du congé maladie ordinaire, le fonctionnaire perçoit la moitié de son traitement indiciaire, sans les primes, pendant une période de neuf mois.
- Congé de longue durée (CLD) : Le maintien du traitement est étendu à trois ans, puis réduit de moitié pour une durée de deux ans supplémentaires.
Ce régime particulier vise à assurer une meilleure sécurité financière pour les agents publics confrontés à des maladies de longue durée, tout en tenant compte des contraintes budgétaires propres au secteur public.
La situation des salariées en congé maternité dans le secteur privé
Dans le secteur privé, le congé maternité ne donne pas lieu, en principe, à un maintien du salaire par l’employeur. Toutefois, la salariée peut bénéficier d’indemnités journalières versées par la Sécurité Sociale si la durée du congé dépasse 8 semaines.
La base de calcul de ces indemnités repose sur le salaire moyen perçu au cours des trois mois précédant le congé, dans la limite du plafond mensuel de la Sécurité Sociale. Ce dispositif vise à assurer un revenu suffisant durant la période de repos obligatoire prévue par la législation.
Autres cas particuliers
La loi précise également que le maintien de salaire est plafonné à une durée maximale de 90 jours par l’employeur, sauf disposition conventionnelle plus favorable. Ce plafond peut être étendu dans certaines entreprises, notamment sous l’impulsion de conventions collectives négociées au sein du groupe (ex. Groupe VYV, Malakoff Humanis, AG2R La Mondiale).
De plus, certains travailleurs, à l’instar des intermittents, saisonniers ou travailleurs temporaires, ne bénéficient pas systématiquement du complément employeur, ce qui entraîne une réduction notable de leur compensation financière en cas d’arrêt.
Statut du salarié | Maintien du salaire | Durée maximale | Particularités |
---|---|---|---|
Fonctionnaire | 100 % puis 50 % puis 50 % | 3 mois puis 9 mois puis 3 ans + 2 ans | Traitement indiciaire et primes, selon type de congé maladie |
Salariée en congé maternité | Indemnités journalières Sécurité Sociale | Dépend de la durée du congé | Pas de maintien salarié obligatoire |
Salarié du privé sous convention collective | 90 % puis 66,66 % | Jusqu’à 90 jours sauf extensions | Selon ancienneté et convention |
Intermittents, saisonniers, temporaires | Pas de complément employeur | N/A | Bénéficient uniquement des IJSS |
La diversité de ces situations spécifiques appelle à une vigilance accrue pour s’assurer que les droits à indemnisation soient bien respectés.

Le rôle majeur des organismes sociaux dans la gestion des arrêts maladie : Sécurité Sociale, CPAM et mutuelles
La prise en charge des arrêts maladie repose sur un ensemble d’acteurs institutionnels et privés chargés d’assurer le versement des indemnités ainsi que la gestion administrative.
La première étape concerne la Sécurité Sociale, via la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM). C’est cette dernière qui examine les justificatifs médicaux et procède au calcul puis au versement des indemnités journalières (IJSS). Le salarié doit transmettre à sa CPAM son arrêt de travail dans les délais légaux sous peine de suspension du versement.
Les montants versés par la CPAM sont plafonnés, comme rappelé précédemment, ce qui génère un manque à gagner pour certains salariés, qu’ils peuvent chercher à compenser via leur employeur ou des dispositifs complémentaires.
À ce titre, les mutuelles santé et les assurances prévoyance jouent un rôle fondamental. Des organismes tels que Malakoff Humanis, AG2R La Mondiale, L’Étoile, Carcept Prev, et Harmonie Mutuelle proposent des garanties “maintien de salaire” couvrant une partie importante de la perte de revenus.
- Ces mutuelles interviennent en complément des indemnités de la Sécurité Sociale.
- Parfois, ces garanties couvrent des arrêts supérieurs à la durée légale fixée par le Code du travail.
- Leur souscription peut être collective au sein de l’entreprise ou facultative.
La complémentarité entre ces acteurs contribue à préserver le pouvoir d’achat des salariés en arrêt maladie, particulièrement dans un contexte économique où les pertes de revenus ont des conséquences majeures.
Il est recommandé aux salariés de consulter la liste des prestations spécifiques de leur assurance maladie complémentaire pour comprendre pleinement leurs droits en cas de baisse de salaire.
Procédures administratives et obligations légales de l’employeur lors d’un arrêt maladie
La gestion d’un arrêt maladie suppose que l’employeur respecte un certain nombre d’obligations prévues par la législation du travail, dont la non-observation peut entraîner des sanctions ou des litiges.
L’employeur doit :
- Recevoir et transmettre l’avis d’arrêt de travail à la CPAM dans un délai de 48 heures.
- Informer le salarié sur ses droits au maintien de salaire et les éventuelles démarches complémentaires.
- Procéder, le cas échéant, au versement du complément de salaire dans les conditions prévues par le Code du travail et la convention collective applicable.
- Adapter ou reclasser le salarié en fonction de son état de santé, notamment en cas d’arrêt durable.
Le non-respect de ces obligations peut conduire le salarié à engager une procédure prud’homale, notamment s’il se voit refuser le paiement du complément de salaire auquel il a droit.
Il est aussi essentiel que l’employeur conserve une trace écrite des échanges liés à l’arrêt maladie pour parer à toute contestation ultérieure.
Par ailleurs, le salarié, pour bénéficier de ses droits, doit impérativement respecter les formalités suivantes :
- Envoyer son avis d’arrêt de travail à sa CPAM dans les 48 heures.
- Informer son employeur dans les délais requis.
- Ne pas exercer une activité professionnelle incompatible avec l’arrêt.
Impact de la réduction de salaire sur les droits sociaux et les cotisations sociales
La réduction de salaire liée à un arrêt maladie ne modifie pas seulement le revenu net perçu, elle influe également sur la base des cotisations sociales et, par extension, sur les droits sociaux futurs du salarié.
En effet, les indemnités journalières versées par la CPAM ne sont pas soumises à cotisations de sécurité sociale, sauf contribution spécifique. En revanche, le complément employeur est soumis aux cotisations habituelles, selon les règles en vigueur.
Par ailleurs, la baisse du salaire brut pendant la période d’arrêt peut entraîner :
- Une diminution des droits à retraite auprès de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV), car ces droits sont calculés sur la base des salaires cotisés.
- Une répercussion sur le calcul des prestations chômage, le montant des indemnités étant basé sur les salaires déclarés.
- Un impact possible sur le plafond de la Sécurité Sociale, modifiant certains avantages ou exonérations.
Il est donc important de bien anticiper ces effets collatéraux et, si nécessaire, de vérifier avec un avocat spécialisé ou un conseiller en droit social les conséquences précises liées à chaque cas.
Elément | Conséquence | Impact |
---|---|---|
Indemnités journalières CPAM | Non soumises aux cotisations sociales classiques | Ne contribuent pas directement aux droits retraite |
Complément employeur | Soumis aux cotisations sociales | Mantient les droits aux prestations sociales |
Baisse de salaire brut | Réduction des cotisations | Diminution des droits retraite et assurance chômage |
Les conventions collectives et accords d’entreprise : impacts sur le maintien salarial pendant un arrêt maladie
Au-delà des dispositions légales, les conventions collectives peuvent définir des règles plus protectrices pour les salariés en arrêt maladie. Ces accords, majoritairement négociés entre les partenaires sociaux au sein de branches professionnelles ou d’entreprises, aménagent parfois les niveaux et durées de maintien du salaire.
Certains groupes, parmi lesquels Malakoff Humanis ou AG2R La Mondiale, proposent aux entreprises des couvertures spécifiques intégrées dans les accords collectifs, souvent étendues au-delà du cadre légal.
- Extensions de la durée de complément de salaire au-delà de 90 jours
- Maintien de primes (ancienneté, performance) durant l’arrêt maladie
- Compléments de garanties pour certains salariés à risques (ex : métiers pénibles)
Pour le salarié, il est donc crucial de consulter la convention collective applicable afin de connaître ses droits précis en la matière. Le non-respect par l’employeur des clauses conventionnelles peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil de prud’hommes.
Par exemple, dans le secteur hospitalier affilié à Groupe VYV, une prise en charge complémentaire est souvent prévue pour les arrêts longue durée, donnant lieu à un maintien supérieur aux minima prévus par le Code du travail.
Type d’accord | Durée du maintien salarial | Particularités |
---|---|---|
Convention collective nationale | Souvent au moins 90 jours, parfois étendu | Maintien des primes possible |
Accords d’entreprise | Variable selon négociation | Garanties complémentaires individuelles possibles |
Accords de branche spécifiques | Peuvent prévoir des durées plus longues | Protection renforcée pour métiers pénibles |
Exemples concrets de calculs de réduction de salaire en cas d’arrêt maladie
L’application des règles légales et conventionnelles peut apparaître complexe sans exemples concrets. Voici plusieurs cas illustrant la diversité des situations rencontrées.
Cas 1 : Salarié avec 3 ans d’ancienneté – arrêt de 50 jours
- Salaire brut mensuel : 2 000 €
- Ancienneté : 3 ans (maintien à 90 % pendant 30 jours puis 66,66 % ensuite)
Le salarié perçoit d’abord 90 % de son salaire brut journalier pendant 30 jours, puis 66,66 % pour les 20 jours restants. Le plafond de la Sécurité Sociale limite les indemnités journalières versées, mais employeur complétera si nécessaire.
Cas 2 : Salariée avec 10 ans d’ancienneté – arrêt de 100 jours
- Salaire brut mensuel : 2 500 € (au-dessus du plafond)
- Ancienneté : 10 ans (maintien à 90 % pendant 40 jours puis 66,66 % ensuite)
Pour les 40 premiers jours, la salariée reçoit 90 % du salaire brut journalier, puis 66,66 % pour les 50 jours suivants (hors IJSS), puis 0 % sauf dispositions conventionnelles. Les IJSS, plafonnées, seront versées par la CPAM, avec un complément employeur programmé si l’ancienne convention le prévoit.
Cas 3 : Fonctionnaire en congé maladie ordinaire de 4 mois
- Maintien intégral du traitement pendant 3 mois
- Puis maintien à 50 % le mois suivant
Le fonctionnaire conserve 100 % de sa rémunération pendant 3 mois, puis 50 % pour un mois suivant avant d’éventuelles évolutions si le congé se prolonge (CLM ou CLD).
Cas | Ancienneté | Durée arrêt | Maintien applicable | Particularités |
---|---|---|---|---|
Cas 1 | 3 ans | 50 jours | 90 % (30j) + 66,66 % (20j) | Possibilité complément employeur |
Cas 2 | 10 ans | 100 jours | 90 % (40j) + 66,66 % (50j) + 0 % | Plafond IJSS, intervention dépendante |
Cas 3 | Fonctionnaire | 4 mois | 100 % (3 mois) + 50 % (1 mois) | Maintien indiciaire et primes |
Recours et assistance juridique en cas de litige sur la réduction de salaire durant l’arrêt maladie
La question des réductions salariales en arrêt maladie peut souvent engendrer disputes et incompréhensions entre salariés et employeurs. Quand la situation se complique, l’intervention d’un avocat expérimenté en droit du travail peut s’avérer déterminante.
- Interprétation des textes : Le juriste aide à clarifier les droits et obligations des parties selon les dispositions du Code du travail et les conventions collectives.
- Négociation amiable : Souvent, un règlement amiable permet d’éviter une procédure longue et coûteuse.
- Assistance en contentieux : L’avocat représente le salarié devant le Conseil de Prud’hommes si le différend débouche sur un litige formel.
- Accompagnement pour remplir les dossiers : L’expertise juridique est précieuse pour constituer un dossier solide auprès de la CPAM, des assurances telles que Malakoff Humanis, AG2R La Mondiale, ou de l’employeur.
Face à une baisse injustifiée de salaire ou un non-versement de compléments, ne pas hésiter à solliciter une aide professionnelle pour préserver ses droits et obtenir réparation.
FAQ – Questions fréquemment posées sur la réduction de salaire pendant un arrêt maladie
- Q : Le salarié en arrêt maladie peut-il percevoir son salaire intégral ?
R : Non, sauf dispositions conventionnelles spécifiques, le salaire n’est maintenu qu’à hauteur d’un pourcentage et sur une durée limitée, complété par les indemnités journalières de la Sécurité Sociale. - Q : Comment sont calculées les indemnités journalières ?
R : Elles correspondent à 50 % du salaire journalier de base calculé sur le salaire brut des 3 derniers mois, dans la limite d’un plafond fixé par la Sécurité Sociale. - Q : Quelles sont les obligations de l’employeur pendant un arrêt maladie ?
R : L’employeur doit transmettre l’arrêt de travail, verser le complément de salaire si applicable et respecter les délais légaux. - Q : Les fonctionnaires bénéficient-ils du même régime que les salariés du privé ?
R : Non, leur maintien de salaire est spécifique, avec un maintien intégral au début puis un demi-traitement sur plusieurs mois suivant le type de congé. - Q : Que faire en cas de litige sur le paiement des indemnités ?
R : Il est conseillé de consulter un avocat spécialisé en droit du travail pour faire valoir ses droits et éventuellement saisir le Conseil de Prud’hommes.